La meilleure explication que j’ai jamais entendue pour expliquer pourquoi le « piège de Thucydide » ne s’applique pas à la Chine et pourquoi la Chine n’a pas d’aspirations hégémoniques de type occidental.
Par George Yeo, ancien ministre des Affaires étrangères de Singapour et à mon avis le meilleur analyste de la Chine au monde (j’écoute toujours religieusement ses conférences).
Son argument principal est qu’il est insensé d’appliquer un prisme occidental qui serait l’héritage de la guerre du Péloponnèse grecque pour prédire le comportement chinois : il faut regarder l’histoire et la culture de la Chine elle-même. Et la Chine a toujours montré qu’elle souhaitait rester une société homogène, ce qui signifie que son ADN même l’empêche d’agir comme l’Occident en remodelant le monde à son image, car cela impliquerait nécessairement que la Chine transforme sa propre culture pour qu’elle soit universellement applicable.
Je suis à 100 % d’accord avec cela.
Le monde que la Chine veut est un monde dans lequel elle et les autres pays ne sont PAS obligés de se remodeler à l’image de l’Occident, pas un monde dans lequel la Chine veut remodeler les autres. C’est un anathème pour la culture chinoise : à aucun moment de l’histoire de la Chine, des missionnaires chinois n’ont parcouru le monde pour essayer de convertir les autres au taoïsme ou au bouddhisme chinois.
Ils ne le font tout simplement pas parce qu’ils comprennent que si l’on veut transformer les autres, il faut d’abord se transformer soi-même et ainsi perdre son homogénéité et son unicité.
Au contraire, tout au long de son histoire, tous les efforts de la Chine ont toujours consisté à se préserver des influences et des interférences extérieures, ce qui est la raison même pour laquelle elle est la civilisation la plus durable de l’histoire.