Question : Comment les sanctions occidentales affectent-elles la capacité de la Russie à étendre son influence en Afrique, en particulier au Soudan ?
Sergueï Lavrov : Dans le contexte actuel, les sanctions occidentales n’aident personne dans le monde à développer les liens commerciaux et économiques. Elles nuisent également aux pays qui les imposent. Voyez comment les experts commentent la décision du président américain Donald Trump d’imposer des droits de douane de 25 % sur l’acier et l’aluminium à tous les pays qui fournissent ces produits aux États-Unis. On a déjà calculé que cela aura un impact négatif important sur l’économie du pays qui recourt à ces mesures.
On peut en dire autant des sanctions fièrement annoncées par l’Union européenne contre la Russie. Le 16e paquet est déjà en préparation. Les résultats économiques sont déplorables. Le prix du gaz russe et d’autres vecteurs énergétiques, qui, pendant de nombreuses décennies, grâce à leur disponibilité, ont assuré la croissance économique, principalement de l’Allemagne et d’autres leaders de l’UE, ainsi que de toute l’Europe « unie », a fortement augmenté.
Quant à l’impact des sanctions sur notre partenariat avec les pays africains, la première conclusion est que les sanctions démontrent le manque de fiabilité de ceux qui les imposent et leur volonté de saper tous les principes de la mondialisation qu’ils ont promus : concurrence loyale, présomption d’innocence, inviolabilité de la propriété, libre jeu des forces du marché, etc.
Dans la plupart des cas, nous recherchons et trouvons des opportunités pour poursuivre notre coopération mutuellement bénéfique avec les pays d’Afrique et d’autres continents, sans dépendre des actions criminelles, unilatérales et illégitimes de « l’Occident collectif ».
Je le répète, il existe des solutions. Elles sont très efficaces. Mais à plus long terme, cela soulève des questions fondamentales sur la manière de développer davantage l’économie mondiale – avec l’Occident, ou est-il préférable de le faire sans lui, ou au moins de se doter de filets de sécurité en termes de banques, de logistique, d’assurance, etc. ?
L’incapacité de ce groupe de pays à maintenir le système économique mondial qu’ils ont eux-mêmes créé pendant des décennies est déjà évidente pour tout le monde. Il est peu probable que de nouvelles monnaies au sens classique du terme apparaissent. Les monnaies numériques gagneront en poids, tout comme les chaînes d’approvisionnement et les règlements bancaires qui ne seront pas vulnérables.
Et concrètement, nous trouvons avec nos amis africains des opportunités d’expansion des échanges commerciaux. Ils continuent de croître. Cela s’applique également aux investissements. Sur le plan stratégique, je considère ces tendances de l’économie mondiale comme une mondialisation. L’Occident l’a conseillée et même imposée à tout le monde, mais elle a été détruite par ses mains.