« Bref si vous êtes hyper-fondamentaliste à ma façon vous ne croyez pas à la chute finale mais à une volatilité interne destructrice, à des destructions internes . Le marché se suicide, se nettoie, il s’auto dévore en marchant.
Cela ne veut pas dire que l’Ombre de la Statue du Commandeur ne se profile pas sur les gnomes qui se prennent pour Prométhée-Don Juan non, car tout cet imaginaire repose en dernière analyse sur le postulat que toujours on pourra émettre des dollars, que toujours il y aura des créanciers qui les accepteront, bref que toujours le monde restera unipolaire.
La variable à surveiller est là, c’est la géopolitique ».– BRUNO BERTEZ
L’un de mes articles les plus importants de ces derniers jours est celui ci,
Editorial. In the box ou outside the box? Poursuite de l’Imaginaire ou victoire du Réel? L’hypothèse du des-ancrage.
Je vous invite à le lire et à y réfléchir.
Cet article part d’une note de JP Hussman, fondamentaliste exceptionnel lequel donne un avertissement très sévère sur les risques de chute du marché boursier. Son texte est remarquable et très convaincant.
Cependant je le précède d’une analyse « outside the box » c’est à dire d’une analyse encore plus radicale et fondamentale que celle de Hussman puisque j’inclue la possibilité réelle mais négligée qui est la poursuite à l’infini de la dérive monétaire et du des-ancrage.
Les actifs monétaires poursuivent, dans cette hypothèse, leur mouvement de monétisation , ils sont de plus en plus des avatars , des mutations de la forme monnaie, des monnaies-like, des quasi-monnaies et, ayant coupé tout lien avec la pesanteur, ils sont , ils ne sont que frivoles. Ils cessent, pour filer une comparaison avec l’art post-moderne, non représentatifs, purement abstraits, à la Soulages ou Hartung, purs désirs d’acquisition , pures passions du jeu. De plus en plus subjectifs, de moins en moins objectifs.
Si on me suit dans cette voie audacieuse, les marchés boursiers actuels ne sont pas une forme dégénérée de l’inflationnisme et de la financiarisation, au contraire ils en sont la forme épurée, un peu comme le Bitcoin est la forme la plus épurée à ce stade de la monnaie Fiat puisqu’il n’est rattaché à rien. On pourrait proposer cette formule analogique terrible; « la bitcoinisation des actifs financiers »!
je sais c’est audacieux mais c’est de la logique pure: la modernité est une élévation vers l’abstraction, vers les ombres détachées des corps, la modernité ce n’est pas le reflet , le reflet c’était avant-hier!
L’hypothèse de la forme dégénérée des actifs financiers est une hypothèse optimiste , elle ménage toujours la rassurante possibilité d’un capitalisme « sain », qui pourrait à nouveau marcher sur ses deux jambes « productives » et rester sociétalement à sa place.
Mon hypothèse est bien plus tragique, voire satanique, la bitcoinisation des actifs financiers ouvre la voie de l’infini, la voie purifiée, aboutie de ce qu’il en est au fond du capitalisme moderne , à savoir un imaginaire social intégral, virtuellement sans extériorité. Sans justification autre que lui même, pure tautologie: les choses sont ainsi parce qu’elles sont ainsi! Votre fille ne parle pas parce qu’elle est muette, on est dans le pur Ouroboros. Et la clôture sur lui même de l’univers du capitalisme fait que dans ce mouvement on vaut « n+1 » parce que l’on a valu « n »!
La logique boursière ainsi décrite se caractérise en effet par une frivolité radicale, par le pur flottement bullaire envahissant qui soumet toute évaluation au jeu des seuls rapports de l’offre et de la demande et des animal spirits… qu’il ne reste plus qu’ à entretenir. Entretenir la ronde ! Ce qui est facile dès lors que l’encadrement institutionnel que constitue l’orthodoxie monétaire traditionnelle se trouve progressivement relâché. Depuis 1971 et 1973 rien n’empêche cette logique de s’étendre puisque la création de monnaie et de crédit n’a plus de limite : quand on est insolvable, on solvabilise en créant de nouvelles liquidités et de nouveaux crédits et de nouvelles ingénieries et cela repart.
Selon cette vision radicale , le désancrage étant abouti, nous sommes dans le pur Imaginaire et les arbres peuvent monter jusqu’au ciel.
Une fois pour toutes, les actifs monétaires, comme les monnaies, comme le dollar: ils sont libres, ils cessent d’etre dépendants des réalités sous jacentes de l’économie productive ; ce sont de purs signes objets du désir de spéculation, ils évoluent dans l’Imaginaire.
Ceci se résume de la façon suivante :
si vous êtes fondamentaliste restreint façon Hussman , vous croyez à la grande Réconciliation à venir et vous vous vous préparez un jour ou l’autre à une chute de 50 à 80% des marchés boursiers;
si vous êtes hyper-fondamentaliste à ma façon vous considérez qu’il n’y a plus de besoin de Réconciliation, que l’on a largué les amarres, que l’on reste dans l’Imaginaire et que seuls les mouvements de réaménagement à l’intérieur de cet imaginaire sont possibles et probables, avec des corrections sectorielles, des rotations, des escarpolette risk-on/risk-off, … mais l’argent reste toujours piégé dans les marchés financiers.
Bref si vous êtes hyper-fondamentaliste à ma façon vous ne croyez pas à la chute finale mais à une volatilité destructrice, à des destructions internes . Le marché se suicide, se nettoie, il s’auto dévore en marchant.
Cela ne veut pas Dire que l’Ombre de la Statue du Commandeur ne se profile pas sur les gnomes qui se prennent pour Prométhée-Don Juan! Non car tout cet imaginaire repose en dernière analyse sur le postulat que toujours on pourra émettre des dollars , que toujours il y aura des créanciers qui les accepteront, bref que toujours le monde restera unipolaire.
La variable à surveiller est là, c’est la géopolitique.
Pour l’instant le charme est rompu sur les marchés, eh oui tout a une fin!
Le risque Nvidia
Pour l’instant le charme est rompu sur les marchés, eh oui tout a une fin!